IA.12 : Oracles.03 : F-utile
L’évolution d’une nouveauté/innovation est fonction de son Paraître ; et comment ce Paraître, surtout s’il est futile, devient une marque sociale des Régnants ; avant de se banaliser.
Seule la phase d’imitation de la marque sociale permet un enrichissement.
Comme l’automobile, la teinture bleu pastel des vêtements suivent ces phases.
Si le Futile peut permettre de s’enrichir, l’Utile permet très facilement de s’appauvrir, au moins financièrement.
Le don à l’Utile, par exemple à l’Institut Pasteur, peut être valorisé s’il est un marqueur social.
L’exemple de l’automobile montre l’atavisme biologique du Paraître des Régnants et la constance du besoin des plus hautes classes d’aller chercher de la nouveauté, chez les Conquérants. J’aurais aussi pu prendre l’exemple darwinien des plumes des dinosaures
Une fois que le Paraître est bien reconnu comme marque sociale des Régnants des plus hautes classes, il est possible de s’enrichir en proposant ce Paraître aux groupes sociaux situés juste en-dessous.
Peu de propositions des Conquérants sont pérennisées, seules celles qui permettent un subtil haussement au sommet de son groupe sont retenues par les Régnants.
Par analogie avec les brevets (en incluant les brevets de prestige et de marketing) : moins de dix pour cent ce ceux-ci sont exploités, moins de pour cent produisent des revenus. Et sans doute un pour mille permet réellement de s’enrichir, ce qui est le même ordre de grandeur que celui de l’apparition des « licornes », ces nouvelles sociétés dont la valorisation atteint le milliard de dollars.
Toutes les classes sociales ont accès à ce Paraître, le marqueur social a été dégradé. Les marges d’enrichissement deviennent très faibles.
Par rapport à la courbe de Simon Sinek représentant la diffusion de l’innovation en fonction du temps, la possibilité d’enrichissement est décalée vers le moment où l’innovation devient un marqueur social
Si l’automobile, après avoir servi à parader sur les Champs Élysées, a été utilisée pour se déplacer, il existe de nombreux autres exemple de produits qui sont restés dans le domaine du futile, c'est-à-dire uniquement comme marqueur social.
Et quoi de plus visible que la couleur des vêtements
Phase 1 : Paraître
En raison de son prix, la teinture bleu pastel est réservée à la plus haute noblesse et au manteau de la Vierge.
Phase 2 : Imitation
L’invention par des « chimistes » du Lauragais de la cocagne a permis au pastel d’être à la portée des classes aisées. La cocagne n’était rien d’autre que l’aboutissement d’un procédé de conservation des propriétés tinctoriales d’Isatis tinctoria L. (la plante utilisée pour teindre en bleu)
L’enrichissement du Lauragais, c'est-à-dire la région comprise dans le triangle Albi-Toulouse-Carcassonne est devenu proverbial, celui du Pays de cocagne.
Phase 3 : banalisation
Mais même sans l’arrivée de l’indigo (Indigofera tinctoria L.), qui a concurrencé Isatis tinctoria, le bleu pastel commençait sa phase de banalisation et les bourgeois du Lauragais leur phase de moindre enrichissement.
Le luxe n’est évidemment pas que dans les vêtements et le secret de la réussite d’Apple est la volonté, dès l’origine, de Steve Jobs de privilégier le paraître, le design, l’apparence ; même dans les cartes mères des ordinateurs, ou la poignée du McIntosh.
Pour savoir si une innovation a quelque chance d’être pérennisée par les Régnants, il suffit de la mesurer à l’aulne de son Paraître, et de préférer la plus futile …
La futilité est un luxe que seuls les Régnants des plus hauts groupes sociaux peuvent se permettre.
Pour espérer s’enrichir, et faire mieux que le 1% de chance, il faut repérer parmi les Paraîtres, lequel sera le marqueur social qui va le mieux être identifié par le groupe des Régnants situé socialement immédiatement en dessous.
En France (contrairement au monde protestant Anglo-saxon), s’enrichir a souvent mauvaise presse.
Parler de marqueur social est tout à fait politiquement incorrect. Surtout de la part de géants du luxe. François-Henri Pinault Président-directeur général de Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga, Boucheron, …) parle pudiquement de « créer une émotion »
Poétique ! Pourtant même Arthur Rimbaud va plus loin dans le processus d’innovation !
Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant.
Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens.
J’espère qu’en dehors du plateau de télévision de BFM Business, François-Henri Pinault parle vrai, parle biologie de l’évolution.
Les marqueurs de « Beauté » sont nés avec la reproduction sexuée (voir les dinosaures à plumes), s’y sont rajoutés chez Homo sapiens, depuis au moins cinq mille ans, des marqueurs sociaux. Ces marqueurs sont tous des moteurs de l’évolution. Nier ces marqueurs ne les empêche pas d’exister et l’espèce Homo sapiens de continuer son évolution.
Nier ces marqueurs, chercher à « créer des émotions » ne peut que biaiser la recherche d’innovations fructueuses.
Je doute que l’Intelligence Artificielle puisse un jour repérer le Paraître, et encore moins le Futile.
Choisir ce qu’il faudrait entrer dans la « boîte » nécessite une analyse objective. Si des données input sont erronées, par exemple « créer de l’émotion » au lieu de « marqueur social », « paraître » ou « futile », il ne faudra pas s’étonner que les données output soient au mieux fantaisistes, plus certainement catastrophiques. « Garbage in, garbage out ! »
Une grande culture restera longtemps la seule la façon de recevoir de bons oracles. Surtout à si cette culture s’ajoute un bon réseau, non pas « neurones artificiels », mais de relations, un bon carnet d’adresses !
Même l’Intelligence Biophysique, que je considère pourtant comme étant la plus proche de l’intelligence humaine, parviendra difficilement à prononcer des oracles sur les marqueurs sociaux, …, car le choix des critères « input » anticipe déjà ce qui va sortir de la boîte.
Quelque soit la boîte, le output sera biaisé.
… à l’inverse, il existe un moyen, presque, infaillible pour s’appauvrir : c’est d’investir dans l’Utile.
« Réaliser des tests avec seulement quelques gouttes de sang, soit entre cent et mille fois moins que la quantité actuellement nécessaire. » serait très utile, c’est que promettait Theranos,
Une molécule inhibant « les protéines responsables de la cancérisation des cellules et de leur prolifération. » serait très utile, c’est ce que promettait Hybrigenics Pharma
Ces deux entreprises ont fait faillite, ou peu s’en faut.
Faut-il pour autant ne pas investir dans l’utile, pas du tout ! mais pas pour faire fructifier ses économies.
Ce n’est pas du cynisme, mais un simple constat, et la finance n’a pas vocation à être « morale ».
Alors autant investir à fond perdu, le geste gagnera en noblesse…
… et en activation du striatum ventral et du septum, deux régions cérébrales associées chez l’être humain à la parentalité, c'est-à-dire un lien entre la Beauté sociale et l’Amour pour les enfants
D’ailleurs, comme le rapporte Bénédicte Salthun-Lassalle dans Pour la Science, pour certains chercheurs, le don augmente le prestige de celui qui fait ce geste au sein du groupe ou encore favorise la cohésion et la coopération.
D’autres ont suggéré que nous sommes généreux parce que nous attendons quelque chose en retour. » Ce quelque chose est évidemment le positionnement social …
Certains autres travaux scientifiques montrent même qu’après un don, nous aurions une sécrétion d’ocytocine, « l’hormone du bonheur », principal élément du feu d’artifice hormonal de l’orgasme !
L’Institut Pasteur fut fondé grâce à une souscription publique lancée en mars 1886.
Elle fut appuyée, en mai de la même année, par un gala au Trocadéro, que l’on peut imaginer aussi élégant que celui peint par Victor-Gabriel Gilbert. Fortement médiatisée, cette soirée fut un marqueur social de ceux qui y participaient et un modèle pour tous les autres.
La légende dit que Louis Pasteur aurait versé une larme quand il vit sur le journal le nom de Joseph Meister dans la liste des donateurs, avec la somme donnée, la minimale mais qui était très importante pour un simple berger.
Le petit berger alsacien avait été le premier à être vacciné contre la rage, selon les indications de Louis Pasteur, sous la responsabilité de deux médecins célèbres : Alfred Vulpian et Jacques-Joseph Grancher … et sous une forte pression médiatique venue … d’Espagne.
Le nom des donateurs était connu et publié. Chacun pouvait y voir son nom et surtout tout le monde pouvait voir le nom, et le don, des donateurs écrit sur le journal.
Le Paraître de chacun était mis en valeur.
Notons que certaines universités américaines voient en Louis Pasteur un modèle à la fois de génie scientifique et de génie de la communication. Existe-t-il des « études du cas » Louis Pasteur dans des cours de marketing en France ?
Il y aurait de nombreux autres sujets à aborder, de nombreuses digressions à poursuivre. Tout ceci fera l’objet d’autres articles sont diverses formes.
À bientôt
Jean-Pierre FORESTIER
Biophysicien, Ingénieur de la Beauté, apprenti bio-philosophe