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Publié par Jean-Pierre FORESTIER

Hic sunt leones - Ici il y a des lions, et nous savions après notre visite de l’île.54 que parmi ceux qui combattent les lions/microorganismes figurent d’une part le Monoxyde d’azote et d’autre part les Défensines  

 

Parmi toutes les îles de l’archipel des Radicaux libres (ROS), nous ne visitons que celui de NO, pour nous diriger vers le grand archipel des défensines

 

    Le messager (cytokine) envoyé par le Récepteur d’amertume provoque, chez la cellule cible, la libération de monoxyde d’azote.

 

NO est un ROS destructeur de bactéries, et un aussi un messager sur de très courtes distances (lien vers l’île.82)

 

     Des enzymes, les NO-synthétases, catalysent la synthèse du monoxyde d’azote à partir de l’arginine (un acide aminé « basique »).

Plus performant que les autres ROS, NO porte ses messages un peu plus loin que les autres et surtout dans toutes les directions. Il tient ces aptitudes à ses propriétés physiques :

1° il n’est pas électriquement chargé ;

2° il est soluble aussi bien dans les graisses que dans l’eau. Rien n’arrête le monoxyde l’azote, ni les membranes lipidiques, ni les phases aqueuses du cytosol ou des espaces intercellulaires.

NO un messager extrêmement puissant puisque, dans le cerveau, une concentration locale de NO d’une picomole par litre (0,00003 mg par litre) suffit pour influer sur le fonctionnement de millions de neurones.

Dans le domaine cardiaque, le monoxyde l’azote est connu comme agent du tonus vasodilatateur (l’inhibition de la destruction de NO est le principe d’action du Viagra® !!)

    Comme les autres ROS, le message porté par NO déclenche une prolifération cellulaire, une différenciation cellulaire ou une apoptose.

     Également comme pour les autres ROS, une production excessive de NO peut conduire à des troubles métaboliques, une inflammation persistante, diverses maladies neurodé-génératives, des accidents vasculaires cérébraux,

… ainsi qu’une perte d’élasticité des molécules fibreuses comme le collagène et l’élastine (voir aussi Espérance de vie et rides. De simples propriétés mécaniques ?)

 

      Les défensines sont des peptides cationiques antimicrobiens à plus ou moins large spectre contre les bactéries Gram+ et Gram-, des champignons, certains virus …,

   Selon Lu Wuyuanb, de l’Université du Maryland (USA), contrairement à ce qui est communément admis, l’efficacité des défensines est davantage due à leur hydrophobicité qu’à leurs charges cationiques. Ce serait notamment vrai pour les alpha-défensines. Nous ne pûmes que souscrire à cette vision biophysique. (voir Dissolution/agrégation des protéines)  .

Hydrophobe d’un côté et cationique de l’autre, les défensines semblent proches des surfactifs cationiques utilisés comme biocides, désinfectants, antiseptiques …

 par exemple :

le Benzalkonium chloride (figure ci-contre),

le Didecyldimethylammonium chloride.

 

- le Chlorhexidine digluconate (ce dernier bénéficiant de 2 charges cationiques)

De même que ces surfactifs, les défensines

- se fixent sur la paroi des microorganismes, y provoque une ouverture, par laquelle l’organisme se vide de son contenu (la lyse bactérienne)

- dénaturent certaines protéines (une protéines dénaturée est en général inactive, ne peut donc pas assurer son rôle dans le métabolisme)

La figure ci-dessous montre pourquoi les défensines Antimicrobialpeptides (AMP) sont efficaces sur les membranes bactériennes et quasiment sans effet sur les membranes des mammifères.

 

 

 

Certaines défensines interagissent directement sur le système immunitaire, pour le … modérer, plus précisément pour limiter une inflammation. Les récepteurs de ces défensines sont les Toll-like receptors (TLRs), spécialistes de la reconnaissance de marqueurs du Non-soi (lien vers Île.93) du système immunitaire inné.

De nombreuses défensines s’offre à notre exploration.

Chez l’homme, ont été répertoriées six sous-types d’α-défensines (HNP-1, etc.), et dix-sept sous-types de β-défensines (HBD-1, etc.)

La figure, empruntée à Laurence Jonard, donne le codage des β-défensines

 

     Notre voyage nous fait également rencontrer la cathélicidine LL-37, mais nous passons sans nous arrêter puisque cet autre peptide antimicrobien est essentiellement produit après une exposition aux UVB, or ni les aisselles, ni l’autre zones où s’activent les glandes apocrines, ne sont atteintes par le soleil.

… à moins de les exposer volontairement en levant le bras, ou d’avoir fait disparaître la toison pubienne.

Question : pourquoi les organes sexuels externes sont ils si pourvus en mélanocytes ?

 

    Dans l’épiderme, les défensines sont, pour la plus large part, produites par les kératinocytes.

En considérant la peau dans sa totalité, des peptides antimicrobiens peuvent également provenir des mastocytes, des neutrophiles et des sébocytes.

- certaines défensines, comme HBD-2 et HBD-3, sont produites uniquement après une induction par un messager (cytokine, lien avec l’Île.53), lui-même ayant pour origine les récepteurs d’amertume (et d’autres, en cas d’inflammation, et autres perturbation de l’homéostasie)

- D’autres défensines (HAD-1 et HBD-1) sont/semblent produites indépendamment de l’intervention de messagers. Sont-elles produites directement après réception de molécules d’origine microbienne ? Lien avec l’Île.52

 

Le tableau ci-dessous emprunté à Joost Oppenheim du Centre de Recherche sur le Cancer (Maryland, USA) indique les cellules produisant des défensines, ainsi que la cathélicidine

 

    L’action de chaque défensine varie grandement d’un microorganisme à l’autre.

Par exemple : Staphylococcus epidermidis, commensal habituel de la peau (Île.07), n’est que peu sensible à l’α-défensine-1 et encore plus tolérant vis-à-vis des β-défensines.

Selon un raisonnement univoque, les résistances de S. epidermidis aux défensines expliqueraient que cette bactérie soit autant présente sur l’épiderme. 

     Voir tableau I, du spectre d’action des défensines également emprunté à Laurence Jonard.

 

Escherichia coli est attaquée par presque toutes les défensines, si cette bactérie n’est pas un hôte ordinaire de la flore cutanée des aisselles, mais elle pourrait se rencontrer sur d’autres zones où se situent les glandes apocrines, comme les parties génitales et l’anus. 

 

Propriétés immunomodulatrices

Comme nous le fait remarquer Joost Oppenheim du Centre de Recherche sur le Cancer (Maryland, USA) les défensines ne sont pas seulement des antimicrobiens.

Pour donner une image de tous les mécanismes biologiques dans lesquelles elles interviennent, Lu Wuyuanb de l’Université du Maryland (USA) les compare à un couteau suisse.

Certaines défensines interagissent directement sur le système immunitaire, pour le … modérer, plus précisément pour limiter une inflammation. Les récepteurs de ces défensines sont les Toll-like receptors (TLRs), spécialistes de la reconnaissance de marqueurs du Non-soi (lien vers Île.93) du système immunitaire inné.

 

Le tableau ci-dessous emprunté à Joost Oppenheim du Centre de Recherche sur le Cancer (Maryland, USA) nous donne quelques exemples d’effet sur les systèmes immunitaires acquis ou innés

 

    

Dans l’intestin, (voir figure Defensin functions) les défensines participent à la protection des cellules souches (stem cells). Qu’en est-il dans la peau ?

 

 

   

 

Des défensines ont été observées dans d’autres tissus que l’épiderme, par exemple : la glande salivaire, la muqueuse gingivale, la langue, les voies aériennes, etc. ;

et aussi au niveau du prépuce, de la prostate, du tractus génital masculin ; de l’appareil reproducteur féminin, de l’utérus, de la glande mammaire, ….

      Les défensines sont exprimées à partir de la région du gène 8p23, région particulièrement « dynamique » et sujette à des recombinaisons (qui ont permis au cours de l’évolution de s’adapter à de nouveaux microbes)..

Les différentes défensines (lien vers l' Île.72) peuvent donc varier très sensiblement d’un individu à l’autre et donc d’agir différemment sur le microbiote cutanée.

    L’effet des récepteurs à l’amertume est modulé par le couple de récepteur (T1R2/T1R3) au sucré.

Ceux qui ont préparé un sirop pharmaceutique savent depuis toujours que le sucre, ou un édulcorant ; « adoucit » la présence d’une substance amère. Il en est de même pour la préparation de nombreuses liqueurs, par exemple la Liqueur de gentiane (lien vers Île.81)

Cette propriété existe non seulement sur la langue, mais partout où les récepteurs à l’amertume et au sucré sont tous les deux présents.

 

Existe-t-il des récepteurs au sucré dans l’épiderme ? La question reste ouverte.

   La limitation par des récepteurs au sucré s’ajouterait à celle vis-à-vis du système immunitaire de certaines défensines (lien vers l’Île.71), aux Cellules de Langerhans (Île.95)

   Les défensines ont-elles un effet sur les récepteurs d’amertume ? C’est probable.

Ce serait une classique rétro-inhibition, un mécanisme selon lequel les défensines limiteraient l’émission de messagers (cytokine ?) depuis les récepteurs d’amertume vers les kératinocytes. Les défensines moduleraient la production des défensines par les kératinocytes.

Cette rétro-inhibition porte-t-elle directement sur les récepteurs d’amertume ? Ou agit-elle via le couple de récepteur du sucré (lien vers l’île.78) ?

 

La visite de l’îlot.38 nous ayant donné un exemple suffisant de la complexité des systèmes biologiques, nous quittâmes rapidement l’île.79, non sans nous demander si les défensines ont le goût de … sucré !

 

J’avoue que je n’ai aucun souvenir d’avoir goûté une solution (très diluée) de chlorure de benzalkonium, ni d’autre surfactif cationique. Si vous en disposer, pouvez-vous effectuer ce test organoleptique ? Je serais surpris que vous y trouviez de l’amertume.

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