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Publié par Jean-Pierre FORESTIER

L’essentiel

Par une domestication réciproque, en domestiquant le blé … la chèvre …, Homo sapiens a été lui-même domestiqué. "Au moins" les « sages » Régnants plus que les « sauvages » Conquérants.

    Domestiqué, l’Homme avait besoin de Maîtres, il en fit des Dieux. Ses dieux furent de puissants bisons, lions ou taureaux ; puis il les fit à son image, puis il n’en garda qu’un seul universel, puis vint le numérique, les GAFA et la religion du S-phonisme.

     Comme toute religion, le S-phonisme a son objet rituel : le Smartphone.

     Par l’intermédiaire du Smartphone, pour la première fois dans l’Histoire de l’Humanité, les Dieux répondent aux Hommes.

     Nouveau symptôme de névrose obsessionnelle, le rituel religieux du Smartphone fait entrer l’humanité dans une nouvelle phase de domestication.

    Homo sapiens devient-il Homo S-phoniens ?

   Comme les anciens dieux, les GAFA rassurent mais aussi surveillent et inspirent la crainte.

     Les Réseaux sociaux sont les nouvelles églises du S-phonisme, pour le meilleur et pour le pire.

    Les GAFA échoueront dans leur volonté de remplacer notre intelligence par leur Intelligence Artificielle et déterministe. Ils périront de cet échec.

    En les détrônant, les « sauvages » Conquérants ouvriront de nouveaux espaces de diversité et de liberté, qui seront bientôt … repris et gérés par d'autres Régnants ... qui feront entrer l’humanité dans la phase suivante de … domestication.

Au cours de l’évolution, selon un phénomène de domestication réciproque, en même temps qu’il domestiquait des animaux comme le loup, la chèvre, la vache, l’oie, etc. … et également des végétaux comme le blé, le riz, etc.

Homo sapiens s’est domestiqué.

Sur l’exemple de la culture du riz, Le Guyader indique qu’il est difficile de dire qui de l’Homme ou du Riz, lequel a domestiqué l’autre, et même en faisant le bilan des avantages acquis par l’un ou par l’autre, considérant tous les soins que l’homme apporte au riz, « Un biologiste assurerait que le riz a domestiqué l’homme... » 

 

Le philosophe avant le biologiste, Friedrich Nietzsche, avait déjà vu « que tous les jugements suprêmes de valeur, tous ceux qui dominent l’Humanité, du moins l’Humanité domestiquée, peuvent être ramenés à des jugements d’épuisés. »

Est-ce l’extravagance de cette découverte qui a poussé le philosophe, pourtant rebelle à bien des égards, à laisser ce texte dans un brouillon, celui d’une préface destinée à son livre La volonté de puissance.

Est-ce par soucis de modération que le « maître des arrières-mondes » a ajouté : « du moins » ? Son « Du moins l’humanité domestiquée » indique bien que toute l’humanité n’est pas domestiquée, et celle qui reste « sauvage » a toujours joué un rôle immense dans l’évolution d’Homo sapiens. Restons pour l’instant à :

 

Humanité domestiquée, le mot était lâché !

 

Or :

 

… pas de Domestique sans Maître.

 

Homo sapiens « soumis aux aléas de la Nature », ne s’inventa pas « des dieux pour expliquer de qui se produit » ; comme l’affirme, en ressortant de vieilles lunes, Yuval Noah Harari dans son Homo deus.

L’Homme domestiqué s’invente un Maître,
L’Homme domestiqué s’invente un Maître pour se rassurer.
En guise de reconnaissance et de soumission, l’Homme domestiqué orne son Maître de religions et de rituels.

Un Maître sait « ce qui se produit ». Il suffit de croire au Maître.

 

Un Maître est orné de religions et de rituels  

 

Un rituel passe aussi des objets, qui sont autant de passages du fidèle Domestique vers le vénéré Maître.

Différents selon les religions, ces objets peuvent être un moulin à prières pour les bouddhistes, un rouleau d’écritures comme le talmud des juifs, un livre relié comme la bible des protestants, ou bien d’autres objets dans l’immense variétés des rituels.

   Mais aucun de ces objets ne répond à une question autant précise que primordiale posée par un humain moderne mais toujours domestiqué, par exemple :

« où est le McDo le plus proche ? »

 

Le Smartphone, lui, le fait.

 

Depuis toujours, les Hommes ont interrogé les Dieux, mais …

 

… pour la première fois dans l’Histoire de l’Humanité, les Dieux répondent aux Hommes.

 

Jamais, les Dieux n’ont montré pareille proximité.

 

Jamais les Dieux n’avaient donné environ un million deux cent soixante dix réponses en 0,40 seconde à la question « qui est dieu ? ».

Et en incluant la question « qui est dieu » dans mon article, celui-ci va s’ajouter aux millions de réponses.

 

Un Maître est indispensable à l’humanité domestiquée. 

 

L’Homme a commencé à se modifier en modifiant son environnement d’abord comme chasseur-cueilleur, puis radicalement quand il s’est construit une maison et a domestiqué des animaux et des plantes.
Ses Maîtres ont suivi son évolution.

 

l’Homme domestiqué s’est d’abord choisi de puissants bisons ou lions, … puis des taureaux-rois ((dont la corrida pourrait être le prolongement) , puis des dieux hiérarchisés à l’image de ses sociétés, puis un seul dieu lumineux et universel.

L’évolution continuant, de nouveaux Maîtres s’imposent aujourd’hui à une humanité de plus en plus domestiquée.

 

Ses nouveaux « dieux » sont les GAFA de la fameuse silicon valley californienne (Google, Amazon, Facebook, Apple) …

… auxquels il convient d’ajouter les chinois BATX : Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi

(par la suite, j’utiliserais GAFA comme terme générique, sachant qu’il inclut les BATX).

Le Smartphone est l’objet rituel qui permet d'honorer les nouveaux dieux numériques. 

Les plus dévots des humains domestiqués utilisent chaque jour leur précieuse machine plus d’heures que les plus pieux des vicaires ne lisent leur bréviaire.

...  ou presque.

 

Signe de syncrétisme entre les anciens dieux et les nouveaux : les bréviaires et autres livres saints peuvent maintenant être lus sur Smartphone !

 

 

 

En référence à la fois au Smartphone et à la Silicon valley des GAFA et bien d’autres leaders mondiaux du numérique, du Big-data, de la high tech, … la nouvelle religion pourrait s’appeler S-phonisme.

 

C’est presque "s-éisme, mais n’est-ce pas une sorte de séisme qui secoue l’univers des Dieux et des Maîtres.

Homo sapiens était devenu depuis le début du XXème siècle Homo œconomicus (ou même du début du XIXème si on suit les écrits de John Stuart Mill), la naissance du XXIème siècle coïncide avec Homo S-phoniens.

 Homo numericus a été proposé, Homo S-phoniens me semble mieux préciser le type de névrose obsessionnelle résultante de l’usage immodéré du Smartphone.

Homo S-phoniens domestiqué montre sa dévotion au Smartphone sur lequel gambillent la pulpe de ses pouces, comme d'autres font rouler sous leurs doigts les grains de leur chapelet.

     Freud, dès 1908, découvre qu’un rituel religieux ressemble à un symptôme de névrose obsessionnelle.

Jamais, sauf peut-être en des temps reculés ou en des occasions exceptionnelles, l’utilisation d’un objet de culte n’a autant ressemblé à un symptôme de névrose obsessionnelle.

Pour s’en convaincre, il suffit de regarder autour de soi, même sur la plage de Biarritz, plus du quart des corps allongés sous le soleil sont prolongés par le précieux Smartphone.

 

 

 

Une névrose ça se soigne ou ça s’entretient. J’ai pu assister à une étonnante démonstration de la version « ça s’entretient ». Elle, environ 16-17 ans, avait accompagné son père au golf. Lui, avait loué une golfette. La difficulté du parcours ne le justifiait pas, je compris bientôt la raison réelle de cette décision.

Lui, la conduisait. Elle, avec autant de dévotion que si elle égrenait son chapelet, faisait courir ses pouces sur son Smartphone. Elle ne le quittant que le temps nécessaire pour frapper dans la balle, en regardant à peine où celle-ci avait roulé.

Lui, un Américain, avait réussi à se faire accompagner par sa fille en louant une golfette permettant ainsi l’entretien d’une névrose. Belle leçon de pragmatisme venant des contrées où siègent les GAFA,

... ou bel échec de l’autorité paternelle selon les points de vue.  

 

Nouveau symptôme de névrose obsessionnelle, le rituel religieux du Smartphone fait entrer l’humanité dans une nouvelle phase de domestication.

Comme pour le riz, nous pouvons nous interroger : « Est-ce l’Homme qui domestique le Smartphone, ou bien le Smartphone qui est en train de domestiquer l’Homme ? »

Les rites d’allégeance à un maître renforcent la cohésion sociale des fidèles domestiqués.

 

Un rituel n’est pas seulement personnel, il est encore davantage une réunion d’émotions, qui à la fois agrège une communauté d’humains et apaise, soulage, console chaque individu domestiqué

Irvin Yalom dans Le Problème Spinoza décrit parfaitement, par la bouche du personnage de Franco, les bienfaits du rituel

« Quand je dirige les prières, … je perds tout sentiment de ma personne, de mon individualité, pour devenir une partie, une toute petite partie, de cette chaîne ininterrompue qu'est la communauté. Cette pensée m'apporte une chose qui n'a pas de prix – comment l'expliquer? –, un lien, une union avec les autres qui me sont d'un immense réconfort. J'ai besoin de cela. Tout le monde, j'imagine, a besoin de cela. »

 

Des nouveaux rituels, le Smartphone en est le bréviaire, les Réseaux sociaux en sont les églises.

Parfois ils en sont la charité, cette « grâce et joie » … [qui] « nous enseigne cette vérité merveilleuse, que les hommes doivent, pour ainsi dire, s'aimer à travers Dieu qui spiritualise leur amour et n'en laisse que l'immortelle essence, » Chateaubriand ajoute, prémonitoire, comme s’il avait déjà entrevu l’usage du Smartphone : « en lui servant de passage. »

 

Parfois, comme dans d’autres églises avant eux, les mêmes réseaux se muent en une sinistre Inquisition. Malheur à celui qui fait un écart ou une mauvaise plaisanterie, le lynchage sur les Réseaux Sociaux est sans appel et pire que la Nota censoria des Romains. Ce sera peut-être mon sort après la publication de cet article.

 

     L’œil d’Horus était partout et surveillait les Égyptiens, l’œil de Dieu a pris le relais chez les Chrétiens. Un Maître-Dieu sait tout sur l’Homo siliconicus, y compris sa vie privée et même ses fantasmes.

 

 

 

À travers les Smartphones, omnipotents et omniprésents, les GAFA ont l’œil qui voit tout.

Les psychosociologues le savent : une surveillance de tous les instants rend les individus bien gentils, sages, aptes à l’obéissance et aussi à la coopération.

 

C'est-à-dire toutes les qualités d’un bon domestique.

Toutes qualités qui ne sont pas pour déplaire aux princes qui nous gouvernent.

Même s’ils se plaignent de ne pas pouvoir suffisamment les taxer, les GAFA sont des alliés objectifs des princes.

Un Domestique collé à son Smartphone va-t-il se rebeller ?

Les Dieux sont des Maîtres. Comme tous les maîtres ils doivent inspirer la crainte et même les effrayer leurs domestiques.

Isabelle Musnik le décrit fort bien dans un article d’Influencia :

« Les GAFA sortes de monstres qui préparent l’avenir sans nous, à notre insu, et grâce aux informations que nous leur fournissons, confiants, ignorants, nous effrayent. »

 

Si les monstres nous effrayent, d’un autre côté nous ne sommes pas tellement scandalisés que les GAFA utilisent les données que nous leur fournissons. Ne sont-ils pas nos Maîtres ?

Les Maîtres savent et doivent aussi être en bons maîtres d’abord répondre aux besoins les plus basiques de leurs Domestiques :

… les nourrir (au McDo ou ailleurs !),

    leur trouver un partenaire sexuel, « J te kiff grave »

    les socialiser, par des rencontres, de la musique (à la socialisation, la musique peut ajouter un aspect culturel), …,

    par leurs conseils, les protéger, les soigner …

auxquels il convient d’ajouter, plus spécifiquement pour Apple, la recherche du paraître, dont la biologie de l’évolution nous montre qu’il a précédé l’être.

 

Nul besoin d’électrodes, la réalité dépasse la science fiction, le Smartphone est l’instrument du Maître.

 

      

 

 

L’ensemble de ces besoins primordiaux sont dirigés par notre cerveau archaïque (limbique et reptilien).

Même si la plupart des philosophes ont toujours essayé de le nier, une observation biologique objective montre qu’Homo sapiens met son intelligence supérieure au service de son animalité, et pas le contraire.

Allant plus loin et à l’inverse des autres philosophes, Schopenhauer affirme même que le cerveau n’est qu’un « parasite » de notre corps.

 

Mais il lui reste un peu de cette intelligence. Peu, c'est encore trop pour les Maîtres, trop pour que l’Homme domestiqué soit un parfait Domestique.

Après avoir dominé notre cerveau archaïque, les GAFA nous promettent l’Intelligence Artificielle.

 

 

 

Soyons rassurés, ils n’y parviendront pas. Enfin pas tout de suite, pas tant qu’ils n’auront pas compris l’Intelligence Biophysique.

 

 

 

 

 

 

 

Cette fatuité de Prométhée moderne pourrait même conduire les Maîtres à leur perte et les détrôner …

    Mais même si quelques dieux finissent par abandonner une vision trop déterministe de l’intelligence, même si avec l’Intelligence Biophysique, ils mettent du « flou artistique dans nos sentiments », soyons quand même rassurés.

 

    Comme l’a parfaitement vu Friedrich Nietzsche en ajoutant « du moins », toute notre humanité n’est pas domestiquée, une partie reste « sauvage »

Cette dualité, le même Nietzsche la compare, dans La naissance de la tragédie, aux deux portes opposées du temple de Delphes, l’une consacrée à la sagesse d’Apollon, l’autre au sauvage de Dionysos (plus exactement à son hybris)

    La sagesse apollonienne est celle de l’Homme le plus domestiqué : le Régnant. Régnant que j’oppose à Conquérant, celui qui commence d’abord par être un Rebelle, comme Dionysos.

 

    Cette opposition marque aussi la féconde diversité de l’espèce Homo sapiens.

Aussi bien les Régnants que les Conquérants, chacun avec leurs talents sont utiles à la perpétuation et la diversification de l’Espèce.

Aux défricheurs succèdent les agriculteurs, aux navigateurs succèdent les armateurs, aux créateurs succèdent les régisseurs.

 

Aux hippies en extase psychédélique, devenus des as du logiciel puis de l’Intelligence Artificielle, ont succédé des capitalistes d’un high-tech triomphant.

   Certains Conquérants, et Nietzsche donne l’exemple de Michel-Ange, sont des « surhommes » qui se surpassent eux-mêmes en surpassant les autres, bien entendu les Régnants mais aussi les autres Conquérants.

 

    Cette opposition marque également la féconde diversité de chaque individu Homo sapiens.

 « Le corps humain se compose de plusieurs individus (de natures diverses), dont chacun est lui-même fort composé. » pose comme premier postulat Spinoza dans son Éthique

Chacun de nous se compose à la fois d’un Régnant et d’un Conquérant.

Chacun de nous est à la fois le « bon » cheval et le cheval fougueux en espérant, comme dans l’attelage décrit par Platon, que le cocher représente bien notre intelligence.

Tous, selon les circonstances, selon notre art (savoir-faire) et selon notre âge, nous sommes tous plus ou moins un Conquérant, tous plus ou moins un Régnant.

 

D’un objet rituel, certains Conquérants, et pas que des « surhommes » ou des « surfemmes », feront du Smartphone de nouveaux outils.

Nouveaux outils, plus de diversité.

Plus de diversité, plus de liberté.

Toute sélection, darwinienne ou lamarckienne, commence par la diversité.

 

Les nouveaux espaces conquis par les « sauvages » Conquérants seront bientôt repris, …sélectionnés et gérés par des sages Régnants qui feront entrer l’humanité dans la … domestication suivante.

L’Homme domestiqué, son Smartphone et ses dieux

À moins que la domestication ultime d’Homo sapiens soit celle décrite par Georges Orwell dans 1984

 

Étrange, fantasmes, merveilleux, fantastique, inexplicable, sont des mots qui volettent autour de l’Intelligence Artificielle comme autour de la « voiture autonome ».

 

Pour finir cette série d’articles sur l’Intelligence Artificielle et ce qu’elle camoufle … et avant même de commencer à comprendre le luxe de la « première version » de la Tesla, penchons nous sur le paraître des premières auto-mobiles, camions et de celui des piles électriques … et les soucis causés par les batteries de puissance

 

En bref : Au cours de l’évolution, Homo sapiens s’est domestiqué en même temps qu’il domestiquait le loup, la chèvre, l’oie, etc. … et aussi le blé, le riz etc.

La « (grande) fatigue » ou la « lassitude » de Nietzsche correspondent à la domestication de l’homme.

L’Homme domestiqué s’est choisi comme Maître d’abord des bisons, des lions, … puis des taureaux, puis des dieux hiérarchisés à l’image de ses sociétés, puis enfin un seul dieu universel.

 

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