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Publié par Jean-Pierre FORESTIER

L’essentiel :

Ce qui peut être considéré comme un  système immunitaire fixe inné a été identifié à la surface de cellules des tissus épithéliaux.

 « Forteresse active » défendant la frontière entre le corps et l'extérieur, ce système immunitaire agit plus tôt et parallèlement à la « cavalerie » du système immunitaire circulant « classique ».

Les « armes » produites par la forteresse active sont l’oxyde nitrique et les défensines.

     Les ligands naturels des récepteurs du système immunitaire fixe sont des marqueurs bactériens, par exemple : les acyl-homosérine lactones ou les quinolones produits par Pseudomonas aeruginosa.

L’oxyde nitrique et les défensines sont capables de détruire les bactéries et également les virus.

     Effet de l’Évolution, les Récepteurs aux marqueurs bactériens se sont multipliés pour faire face à différentes bactéries pathogènes. Vingt cinq Récepteurs ont été inventoriés chez l’espèce humaine, chacun  étant exprimé différemment selon les individus (polymorphisme)

      Présents également sur la langue, ces Récepteurs nous informent, via le nerf gustatif, si une nourriture est avariée ou consommable.

« Caprice » de l’Évolution ? Certains végétaux ont produit des substances mimant les marqueurs bactériens et activant des récepteurs de la langue. Ces mimes sont interprétés comme étant « amers ». L’appellation TAS2R donnée aux Récepteurs du Système immunitaire fixe (les forteresses actives) découle historiquement de ces relations avec le goût : TAS pour « taste », « R » pour récepteur. TAS2R = Récepteurs à l’amertume

    Les TAS2R ne sont pas présents que sur la langue et mais aussi à la surface de nombreuses autres cellules humaines.

Quand ils sont présents, il est remarquable que les Récepteurs à l’amertume/à des marqueurs microbiens soient, pour un même individu, identiques pour toutes ses cellules.

          Dans les voies aériennes et dans d’autres tissus (épithéliaux) en contact avec des microbiotes, les TAS2R agissent comme une « forteresse » immunitaire active, celle du système immunitaire fixe.

Ailleurs, l’activation des

Récepteurs à l’amertume/à des marqueurs microbiens

 produit des effets différents, complètement différents !

(voir article Différentes réponses à l’activation des TAS2R )

 

Le Récepteur à l’amertume TAS2R14 pourrait avoir la propriété particulière d’être activé par des défensines, provoquant un effet amplificateur de la réponse du système immunitaire fixe 

 

  Un nouveau système immunitaire a été mis en évidence il y a environ une dizaine d’année .

Il a été nommé : TAS2R, nous verrons plus tard l’origine historique de cette appellation.

       Contrairement au système immunitaire déjà connu, celui de cellules circulant dans l'organisme, ce "nouveau" système immunitaire est fixe et plus exactement membranaire.

Le qualificatif de « fixe » des Systèmes immunitaires fixes ne s’applique qu’à un instant précis. Les Forteresses actives sont remplacées au fur et à mesure que les cellules épithéliales sont renouvelées (voir § équilibre dynamique)

 

    Cette présence permanente lui permet de réagir immédiatement à une invasion « ennemie »..

 

Le système immunitaire fixe peut être comparé aux forteresses construites aux frontières,

...

.... tandis que le système immunitaire circulant serait une armée se déplaçant sur le lieu de l’invasion.

Nous verrons que les actions induites par l’activation des TAS2R différent (considérablement) selon la cellule à la surface de laquelle ce système immunitaire est présent, mais pour suivre l'historique de la découverte des TAS2R  prenons l’exemple de l'un d'entre eux situé sur la membrane de cellules nasales ciliées humaines

 

Figure empruntée à Robert Lee et Noam Cohen ( Taste receptors in innate immunity)

 

 

Une bactérie pathogène, Pseudomonas aeruginosa, (figure de droite b) produit  des molécules d'acyl-homosérine lactones (AHL, voir formule chimique ci-dessous). Pseudomonas aeruginosa synthétise cette substances pour créer un biofilm (figure de gauche a) dans lequel elle s'abrite.
       Dans ce biofilm
Pseudomonas aeruginosa devient particulièrement résistant aux antibiotiques.

Dans la formule chimique précédente, R est une chaîne grasse qui apparait comme une "queue" en zig-zag sur le schéma.

 

Les AHL doivent avoir des propriétés tensio-actives, comme les saponosides présents dans de nombreux « actifs » de la cosmétologie (Centella asiatica, Calendula officinalis, etc

 

 

 

Quelqu’un a-t-il goûté de l’AHL pour en vérifier l'amertume ?

     

 

Les acyl-homosérine lactones (AHL) sont reconnues par le TAS2R.

 

Les TAS2R sont les récepteurs.

Les AHL sont les ligands

 

 

L’activation du récepteur TAS2R par un ligand déclenche tout un ensemble de réactions destinées à éliminer la bactérie (P. aeruginosa) :

La réponse immédiate est la production de l' oxyde nitrique  (NO) Voir § spécial sur Oxyde nitrique

L’oxyde nitrique est un destructeur non spécifique (comparable à une « super eau-oxygénée), il détruit tout ce qui est à sa portée, y compris des virus ….

 

... Ainsi que les récepteurs TAS2R
... et les cellules qui portent.

Les Forteresses du tissu épithélial sont détruites.
Selon une tactique, très militaire de repli stratégique 
(ordonné par les lymphocytes sentinelles ?)
les Forteresses détruites sont considérées « comme perdues » (la couche qui « pèle »).
De
nouvelles Forteresses actives seraient construites en quelques jours, créant une nouvelle frontière défensive située à l’arrière du front, du tissu épithélial.

Activé, le récepteur activé par des marqueurs bactériens produit également (indirectement) ...

... des défensines, peptide amphiphile et cationique,… qui participent également à la destruction des bactéries.

Les défensines sont également capable de détruire les virus

Voir voir § spécial sur les défensines

 

SARS-Cov-2 ?

La perte du goût (et des odeurs) laisse supposer que les SARS-Cov-2 parviennent à cibler la destruction des Récepteurs à l’amertume TAS2R, ou plus exactement détruire les cellules (épithéliales) à la surface desquelles ces Récepteurs sont placés. (Voir L’art militaire des SARS-Cov-2. Détruire les défenseurs)

Le mécanisme d’action de destruction des virus présenté ici pourrait être celui de la Forteresse active contre les SARS-Cov-2

 

Duos de récepteurs

En réalité, les TAS2R agissent en duo (de même que les récepteurs au sucré, ceux à l’umami/glutamate, ceux aux divers acides gras, ....).
      Pour que le mécanisme cellulaire soit déclenché, il est nécessaire qu’un ligand soit fixé sur chacun des deux récepteurs. Cette particularité permet de déclencher une réponse que quand un nombre "suffisant" de molécules de AHL est présent dans le milieu environnant.

 

Remarque : l’effet des récepteurs à l’amertume est modulé par le récepteur au sucré TAS1R2-TAS1R3, que le sucre soit « habituel » ou un édulcorant ; non seulement sur la langue, mais partout où les récepteurs à l’amertume et au sucré sont à la fois présents.
(Le duo de récepteurs au sucré T1R2-T1R3 ne semble pas être présent dans Chosmo epidermis, Dans le complexe épiderme-microbiote cutané, l’activation des récepteurs à l’amertume pourrait être modulée par un récepteur aux acides gras à très courtes chaînes : GPR43, ainsi que GPR109A.)

On peut penser qu'au cours de l’évolution ( ? ) le Système immunitaire fixe s’est diversifié pour répondre à l’attaque de divers microbes

   

D’autres récepteurs se lient à d'autres molécules issues d’autres bactéries.

Ces autres ligands sont par exemple :

- les quinolones , des acyl-homosérine lactones,

 

Au final, actuellement 25 récepteurs du Système immunitaire fixe sont connus chez l’Homme

La souris en compterait 35 TAS2R, et 49 pour le xénope (une grenouille utilisée couramment dans les laboratoires),

 

Diversité à laquelle s’ajoutent de très larges différences individuelles (polymorphisme)

 

Il est remarquable, qu’à ce jour, aucune protéine ne se soit révélée activatrice d’un Récepteur à l’amertume (ni de Toll-like), alors que

- plusieurs sont activatrices du duo de Récepteurs au sucré TAS1R1/TAS1R3

- à l'inverse, les protéines (principalement des glycoprotéines ) sont les antigènes contre lesquelles la Cavalerie (du système immunitaire adaptatif ; et circulant) forme des anticorps

Les organes où des Récepteurs du système immunitaire fixe a été mis en évidence sont en bleu ou vert sur ce schéma. 

Il conviendrait d'ajouter la peau
Ainsi que les macrophages, cellules du système immunitaire circulant. 

 

Un système immunitaire fixe dans tout le corps ?

Oui et non

1° Les Récepteurs ne sont présents que « dans » certains organes

2° Les réponses à l’activation des Récepteurs sont très différentes d’un organe /une cellule à l’autre voir Différentes réponses à l’activation des TAS2R

 

Pour éviter d’ingérer des aliments qui seraient contaminés par des bactéries pathogènes, on peut imaginer qu’au cours de l’Évolution ( ? ) les récepteurs présents sur la langue devinrent des informateurs.

     Au lieu de détruire les bactéries, l’activation des TAS2R permet de transmettre au cerveau, par l’intermédiaire du nerf gustatif, une information sur la qualité de la nourriture ; c'est à dire si celle-ci peut être consommée ou doit être recrachée.

( Figure empruntée à Loïc Briand )
 

 

Remarque 1 : la mimique de celui qui avait fait le test devait être suffisante pour informer le reste des commensaux !

 

Remarque 2 : l’information sur la présence de bactéries pathogènes devait être particulièrement importante quand Homo sapiens, et ses ancêtres, n’étaient encore que des charognards.

 

La petite pointe de pourriture du faisandage est encore appréciée par certains gastronomes 

Le système immunitaire circulant, déjà connu, possède une composante de défense innée ainsi qu’une composante de défense acquise par l’expérience des « guerres » précédentes contre des bactéries, parasites, virus

Fruit d'une longue évolution, le système immunitaire fixe est inné et fixe, c'est-à-dire qu’il est présent dans les membranes cellulaires de chaque individu dès sa naissance (mais il est très variable d’un individu à l’autre)

Dans l’article sur le « Système immunitaire » de Wikipédia,

la « première couche » est  « la barrière épithéliale, comme la protection par la peau et les muqueuses, »

          Ce texte laisse entendre que cette « barrière » est passive.

Or, le système immunitaire fixe n'est pas seulement une défense passive, physique, mais aussi une défense comportant une réactivité biochimique.

La forteresse du système immunitaire fixe n’est pas seulement un « rempart », il possède des armes de destructions actives pour repousser les envahisseurs pathogènes :

- de la "poix bouillante" = l’oxyde nitrique

- des "volées de flèches" = les défensines

Placé en « première ligne » le système immunitaire inné réagit avant le système classique circulant.

Or, la lutte contre un agent infectieux est souvent une course de vitesse

 

La Forteresse ne peut (évidemment) être active que si elle n'a pas été détruite (phase inflammatoire) !

Un système de défense détruit est sans efficacité !

 

(La thérapie anti viral/Covid ne peut être que précoce, c'est-à-dire qu'elle ne peut être utilisée uniquement que pendant la phase virale.)

L’histoire de l’Évolution ne s’arrête pas à la diversification des Récepteurs.

Elle doit aussi tenir compte d’un autre partenaire : le règne Végétal.

Ceux qui mangeaient des charognes consommaient aussi (surtout) des fruits, des feuilles et aussi des racines.

     Pour se protéger de tous ces prédateurs, les végétaux "inventèrent" des substances minant la contamination par des bactéries pathogènes (version Lamarck)

Disons plutôt que la Sélection naturelle favorisa les végétaux qui produisaient ses mimes (version Darwin).

 

Ces mimes sont interprétés par le cerveau comme des

substances amères.

 

 

 

C'est-à-dire que : l’activation des Récepteurs de la langue par ces substances végétales est interprétée par le cerveau comme indiquant la présence d’un marqueur bactérien.

En termes de goût, le cerveau le définit comme étant l’amertume   

 

"Amer :

Âpre et souvent désagréable au goût, comme la saveur que procurent le quinquina, la gentiane ou le fiel de certains animaux.

Antonyme. sucré, doux » CNRTL

... auquel pourrait être ajouté le ... brocoli

 

Remarques : Les végétaux ont d’autres stratégies que l’amertume pour lutter contre les prédateurs,

- le β-amino propionitrile provoque des malformations chez l’enfant et le fœtus (le lathyrisme). Pois de senteur (Lathyrus odoratus L.)

 

- les inhibiteurs des enzymes de la digestion des protéines dans les Légumineuses/Fabacaea, … conduisant à une anémie, une santé fragile ….

En réalité, les plantes reconnues comme alimentaires pour l’espèce humaine ne constituent qu’une infime proportion de l’ensemble des végétaux mis à sa disposition par la Nature.

Et, si ces végétaux sont comestibles c’est souvent au prix d’une transformation allant du plus simple, comme l’épluchage (émondage), … la cuisson (voir  la soupe l’Homo sapiens.), … jusqu’à la fermentation.

 

L’utilisation, par des végétaux de mimes de contamination bactériennes pourrait être considérée comme un hasard/caprice de l’Évolution.

Cette « stratégie » de protection des végétaux par l’amertume a une conséquence inattendue :

les récepteurs du Système immunitaire fixe sont aussi des Récepteurs à l’amertume.

        Nous pouvons maintenant dévoiler le mystère de l’appellation TAS2R :

TAS (ou parfois, simplement T) pour « taste »,

« R » pour récepteur

C'est-à-dire :  Récepteur à l’amertume

(2, pour l’amertume, 1/3 pour le sucré, 1/2 pour l'unami )

Bien que les TAS2R aient des propriétés communes, en réalité ils ne se comportent comme un Système immunitaire fixe (de destructeur de bactéries) que dans les tissus épithéliaux, ailleurs c’est différent !

Selon les cellules à la surface desquelles ils sont présents, l’activation des TAS2R produit des réponses (très) différentes

Les TAS2R

- sont activés par des molécules d’origines bactériennes et également par des substances amères : végétales ou synthétiques.

- sont placés à la surface des cellules, inclus dans la membrane.

- font tous partie de la famille de récepteurs couplés aux protéines G.

- agissent en duos

- sont plus ou moins spécifiques et ont plus ou moins daffinité pour différentes substances amères

- sont très polymorphes, c'est-à-dire qu’ils sont différemment exprimés selon les individus

 

Chaque humain exprime les vingt cinq TAS2R différemment mais, pour un même individu ses TAS2R sont, autre sujet d'étonnement, les mêmes quelque soit la cellule à laquelle ces récepteurs sont intégrés.

C'est-à-dire que, pour un même individu, les Récepteurs à l’amertume sont les mêmes sur la langue et dans les voies respiratoire, et le cœur, et les macrophages, et le cerveau … !

        C'est-à-dire que la perception sur la langue prédit la nature du Système immunitaire fixe des voies respiratoires ! voir ci-dessous les travaux de Robert Lee et Noam Cohen

Si TAS2R sont les mêmes partout dans le corps, pour chaque organe, l'activation des TAS2R provoquent des réponses très différentes,

L’exemple le plus flagrant est la différence de réponse entre

- celle donnée par la langue  : neuronale)

- et celle donnée par les voies aériennes, (l’exemple qui a servi d'introduction où la réponse était destruction des microorganismes "à coup" d'oxyde d'azote (NO) et de défensines.

Et même ; parmi les tissus épithéliaux, les réponses peuvent présenter des variantes selon qu’on observe les voies aériennes, la peau, les intestins ….

 

    Les réponses des autres organes sont également très différentes, nous y reviendrons dans

Différentes réponses à l’activation des TAS2R

 

Les TAS2R sont plus ou moins spécifiques de substances amères/marqueur bactériens.

 

TAS2R46 est le meilleur exemple d'une grande largeur de spectre de réactivités. Peu spécifique, il est activé par 21 des 58 substances amères (végétales ou synthétiques) testées par  Wolfgang Meyerhof et ses collègues du Département de génétique moléculaire de Nuthetal, Allemagne).

 

D’autre part, une même substance amère peut activer plusieurs TAS2R.

Par exemple,

    la colchicine active les TAS2R4, le TAS2R39 et le TAS2R46 (mais pas le TASR10)

    La quinine, ci-dessus, fait partie des substances qui activent le plus grand nombre de TAS2R (neuf), dont le TAS2R4, TAS2R7, TAS2R14, TAS2R10, TAS2R46 mais elle n’active pas le TAS2R38

 

Quand au récepteur à l’amertume TAS2R7 (activé par la quinine), il réagit également à différents ions métalliques notamment le
zinc Zn2 + et aussi le magnésium Mg2+; le manganèse Mn2+

Activation par les substances bactériennes  

Je n’ai pas trouvé dans la littérature d’inventaire équivalent à celui réalisé par Wolfgang Meyerhof

où les TAS2R seraient associés à des fragments bactériens,

… voire viraux, fongiques ou parasitaires.

J'ai peut être mal cherché, merci de me le signaler (ou bien avis à ceux qui chercheraient un sujet de thèse !)

Chaque TAS2R n’a pas la même affinité pour les molécules amères.
Par exemple, il faut environ trente fois plus de caféine que de quinine pour produire la même activation des récepteurs à l'amertume.
Et cette proportion varie également considérablement d'un individu à l'autre (
polymorphisme).

Remarque : la saccharine utilisée comme édulcorant (ligand du Récepteur au sucré) est aussi un activateur de récepteurs à l’amertume, TAS2R43 et TAS2R44, et donne en plus un arrière goût métallique (chez certains individus)

Du grec « poly » plusieurs et « morphê » forme, le polymorphisme génétique désigne la coexistence de plusieurs allèles (parties variables) d'un gène.

Dans une population polymorphe, les individus présentent des caractères phénotypiques différents (appelés morphotypes).

Le polymorphisme permet à une Espèce de s’adapter à un nouvel environnement

 

  "de gustibus et coloribus non disputandum"

(même si, selon Nietzsche, « nous ne faisions que cela » !, Ainsi parlait Zarathoustra. § Des hommes sublimes).

La figure publiée par Danièle Campa donne un aperçu du polymorphisme des récepteurs d’amertume et du nombre de possibilités de récepteurs différents.

 

Ce polymorphisme des récepteurs à l'amertume est multiplié par celui des défensines, (voir § Variété et polymorphisme des défensines)

Voir dans l’annexe Polymorphisme et teneur en hydroxychloroquine dans le sérum des exemples de la grande diversité de réponses à quelques malades à deux substances amères.

Voir aussi dans l'Annexe : Amertume et longévité, quelques exemples de la grande diversité de l'humanité face au goût.

Robert Lee et Noam Cohen du Département d’Oto-rhino-laryngologie de la Perelman School of Medicine de l'Université de Pennsylvanie (USA) sont les pionniers ayant établi des relations entre les différentes sensation à l'amertume et des pathologies des voies aériennes 
 

(voir aussi leur article dans Pour la Science : L'amertume, sentinelle du système immunitaire ainsi que : Role of the bitter taste receptor T2R38 in upper respiratory infection and chronic rhinosinusitis

Robert Lee et Noam Cohen précisent :

« La plupart des 25 récepteurs présentent des variations génétiques qui augmentent ou diminuent les capacités [des TAS2R à réagir comme système immunitaire fixe]

Les personnes qui sont dotées [de ces variations génétiques, voir polymorphisme] sont ainsi plus ou moins sensibles aux substances amères. [et aux marqueurs bactériens]»

  _

La substance amère mise en évidence par Lee et Cohen

- à laquelle certaines personnes sont plus sensibles

- et qui correspond à une diminution des capacités du système immunitaire fixe est

la phénylthiocarbamide,  la molécule amère du brocoli, des choux de Bruxelles, …

 

La phénylthiocarbamide du brocoli mime les acyl-homosérine lactones (AHL) produits par Pseudomonas aeruginosa.,

voir mécanisme d’action

 

J’ai dénommé Brocoli-Beurk les personnes ne supportant pas l'amertume du brocoli .

Voir Goûter l’amertume pour prédire. Les Brocoli-Beurk

Les conséquences des observations de Lee et Cohen sont multiples 

 

1° L’expression des TAS2R étant les mêmes dans les voies aériennes et sur la langue, la sensation d’amertume donnée par les nerfs gustatifs peut prédire la nature des TAS2R qui sont présents « ailleurs »

Lee et Cohen ont montré que la sensation d’amertume ressentie par les Brocoli-Beurk correspond :

- à la fois à la prédisposition aux infections des voies respiratoires supérieures et aux rhino-sinusites chroniques

- et à une surexpression du TAS2R38 chez ces personnes (et à une sous-expression d’autres TAS2R, notamment le TAS2R10)

2° les TAS2R, des voies aériennes, mais également d’ailleurs, peuvent être activés non seulement par des « fragments » bactériens mais aussi par des molécules amères d’origine végétale ou de synthèse, et devenir des ... médicaments.

Par exemple, pour les voies respiratoires : le camphre, la quinine (et ses dérivés comme l’hydroxychloroquine)

3° l’observation selon laquelle « Les personnes qui sont dotées [de ces variations génétiques] » reconnaît, en filigrane, la différence entre les personnes et qu’elles doivent être soignées en fonction de l’expression de ces variations génétiques.

Cette diversité des traitements va en l’encontre du dogme officiel selon lequel toutes les personnes doivent être soignées de manière identique. 

Par exemple, le camphre active le Récepteur à l’amertume TAS2R10, etc. mais n’active par le TAS2R38, il n’est donc pas/peu efficace chez les Brocoli-Beurk, voir 1° ci-dessus.

Par contre d’autres substances amères comme
le Clofoctol (un mime des quinolones)
la Chlorphénamine
        activent le TAS2R38
 

Voir Goûter. L’amertume pour soigner ... les Brocoli-Beurk ?

4° Les observations de Lee et Cohen donne une l’ouverture insoupçonnée vers d’autres façons de concevoir des thérapies, à la fois originales et personnalisées !

Et permettant l’utilisation de « vieux » médicaments.

 

Mais c’est une autre histoire ! 

Voir La liste de Steven Munger 

 

Le qualificatif de « fixe » des Systèmes immunitaires fixe ne s’applique qu’à un instant précis. 

Fixée à la surface (dans la membrane) des cellules épithéliales, la Forteresse active est naturellement détruite quand la cellule est renouvelée.

Par exemple, dans un tissu épithélial comme l’épiderme, le cycle de renouvellement des kératinocytes est de 28 jours ;

dans l’intestin grêle, il est de 3 à 5 jours ;

 

 

dans l’épithélium respiratoire, il est de « quelques jours ».

Les cellules épithéliales sont dans un flux de renouvellement constant, il conviendrait donc de définir le Système immunitaire fixe comme stationnaire dans un « équilibre dynamique »

Bien que des TAS2R aient été observés par ... Ute Wölfle et ses collègues de l’université Goethe (Frankfurt, Allemagne) dans toutes les couches de l’épiderme, ...

 

.... il est probable que c’est dans le stratum granulosum (couche granuleuse) que les Récepteurs à l’amertume sont le plus fonctionnels.

Au fur et à mesure de la kératinisation et de la formation de la couche cornée, d'active, la forteresse devient uniquement physique/mécanique, passive.

 

Au cours de la desquamation, les cornéocytes entraînent avec eux une partie des envahisseurs, piégés dans les kératines à la fois amphiphiles et amphotères (porteurs à la fois zones hydrophiles et lipophiles et de charges positives et négatives), et éventuellement également piégées dans le sébum. Dans l’épithélium des voies aériennes le « piège » est le mucus.

 

De leur côté, les lymphocytes sentinelles ne sont pas éliminés par le mouvement de renouvellement des couches épithéliales. Ils doivent donc créer au fur et à mesure, via des cadhérines, de nouvelles jonctions avec de nouvelles cellules.

Le monoxyde d’azote ou oxyde nitrique est un ROS (une « eau-oxygénée" super puissante ») destructeur de bactéries, et de virus (NO has an antiviral effectmais est aussi un messager.

 

     Des enzymes, les NO-synthétases, catalysent la synthèse du monoxyde d’azote à partir de l’arginine (un acide aminé cationique).

Plus performant que les autres, NO porte ses messages un peu plus loin que les autres ROS et surtout dans toutes les directions. Il tient ces aptitudes à ses propriétés physiques :

1° il n’est pas électriquement chargé ;

2° il est soluble aussi bien dans les graisses que dans l’eau. Rien n’arrête le monoxyde l’azote, ni les membranes lipidiques, ni les phases aqueuses du cytosol ou des espaces intercellulaires.

NO est un messager extrêmement puissant puisque, dans le cerveau, une concentration locale de NO d’une picomole par litre (0,00003 mg par litre) suffit pour influer sur le fonctionnement de millions de neurones.

Dans le domaine cardiaque, le monoxyde l’azote est connu comme agent du tonus vasodilatateur

             (l’inhibition de la destruction de NO est le principe d’action du Viagra® !!)

   

À une infection importante, les cellules du système immunitaire fixe répondent par une production importante de NO.

Cette, trop, importante production est aussi le signe que la forteresse devient insuffisante à contenir l’attaque ennemie.  

Or, comme les autres ROS, NO est également un puissant messager, à partir d'une "concentration importante" il alerte l’autre système immunitaire, le circulant. Celui-ci crée alors une « zone de guerre » qui se concrétise notamment par une inflammation, l’arrivée des armées de macrophages, etc.

... et également une prolifération cellulaire, une différenciation cellulaire ou une apoptose.

     Également, comme pour les autres ROS, une production excessive et persistante de NO peut conduire à des troubles métaboliques, dont diverses maladies neuro-dégénératives, des accidents vasculaires cérébraux, ...

… ainsi qu’une perte d’élasticité des molécules fibreuses comme le collagène et l’élastine (voir aussi Espérance de vie et rides. De simples propriétés mécaniques ?)

Les défensines sont des peptides amphiphiles
- comportant une importante zone hydrophobe
- à charges cationiques 

Ces propriétés permettent aux défensines de « percer » la membrane de (certaines) bactéries et/ou de désactiver leurs protéines

Hydrophobe d’un côté et cationique de l’autre, les défensines sont proches des surfactifs cationiques (ammonium quaternaires) utilisés comme biocides, désinfectants, antiseptiques …

 par exemple :

- le Benzalkonium chloride (figure ci-contre),

 

- le Didecyldimethylammonium chloride

- et surtout : le Chlorhexidine digluconate

Les défensines, de même que leurs équivalents biomimétiques, peuvent

- perforer les membranes lipidiques cellulaires (en haut sur la figure)

- dénaturer les glycoprotéines de l’enveloppe du virus (en bas)

L'un et/ou l'autre suffisent à détruire le virus

 

Voir  la revue : Defensins in innate antiviral immunity

de Mary Klotman et Theresa Chang de la Division des maladies infectieuses de l’École de médecine du Mont Sinaï (New York), auxquelles j’ai emprunté la figure ci-dessus

Selon Wolfgang Meyerhof, du Département de génétique moléculaire (Nuthetal, Allemagne) la chlorhexidine activerait le récepteur à l’amertume TAS2R14

     Ce qui me laisse supposer qu’au moins une défensine le fait aussi !

L’activation par une défensine du récepteur à l’amertume TAS2R14 serait une amplification du nombre de Récepteurs à l’amertume entrant en action,
ou pour reprendre une image militaire, le TAS2R14 répondrait à un appel à des renforts envoyé par un messager, ici une défensine.

Or ce récepteur à l’amertume ferait partie des plus exprimés (au moins chez les Brocoli-Miam, ceux qui aiment les brocoli, à l'inverse des Brocoli-Beurk)

 

 

Schéma hypothétique de l'activation de TAS2R14 par une défensine détruisant des bactéries
(P. aeruginosa)

 

 

 

 

 

 

 

 

Destruction de virus après une activation de TAS2R14 par une défensine

Exemple de la colchicine

La colchicine active les TAS2R4, le TAS2R39 et le TAS2R46, mais pas le TASR14 (ni le TAS2R10).

L’activation des TAS2R4, 39 et 46 conduit à la libération de défensines.
Si la personne traitée par la colchicine exprime le Récepteur à l’amertume TAS2R14, selon mon hypothèse, les défensines produites activeraient indirectement le TAS2R14 renforçant l’effet de la colchicine.

L'activation des TAS2R peut produire des effets (très) différents les uns des autres selon les cellules/organes à la surface desquels ils sont présents

- sur la langue, l’effet est neuronal. L’activation nous informe sur le goût amer.

- les tissus épithéliaux étant en contact direct avec l’extérieur, donc avec des microbiotes, les réponses s’apparentent à celle du Système immunitaire fixe. Pourtant il existe des différences entre les voies aériennes, la peau, les intestins, …)

- dans l’épiderme, l’activation serait-elle orchestrée par le cellule de Langerhans ?  

- chez les macrophages, paradoxe ! l’effet est anti-inflammatoire, c'est-à-dire l’inverse d’un des effets produit par le Système immunitaire fixe

- dans le tissu cardiaque, une modification de la contractilité cardiaque et du tonus vasculaire global a été observée.

- dans le tissu adipeux, le jeu avec les Récepteurs au sucré (comme dans les intestins), rend les effets encore plus complexes

- quelles cellules du cerveau possèdent des TAS2R? la microglie ? les astrocytes ? Les « bienfaits »  des substances amères seraient de mimer un jeûne, avec les mêmes « effets positifs » que ceux apportés par des exercices physiques.

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